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identités - Page 4

  • Paroles d'un vieil indien

    Je suis un vieil Indien, mais je refuse de marcher en file indienne

    Je suis hors d’atteinte,
    Hors du temps,

    Hors de votre temps,
    Celui que vous mesurez avec le tic-tac de vos horloges,
    Hors du temps que vous épuisez avec vos comptes à rebours,
    Et qui s’évanouit dans vos rêves,

    Moi, je veux vous parler d’un autre temps,
    Du temps qui a échappé au Big Bang,
    Et dont l’unité de mesure est l’éternité,
    Du temps qui ignore hier et n’engendre point de futur,
    Du temps dont je suis l’horloge parlante,
    Moi, le vieil Indien qui refuse de marcher en file indienne,

    Je suis Arabe !
    Adorateurs du Billet vert, construisez vos tours,
    Elles ne m’intéressent plus,

    Je suis Juif !
    Et vos gaz ne peuvent plus m’asphyxier,

    Je suis Manouche !
    Et vos poules ne sont pas assez grasses à mes yeux,

    Vous me reconnaissez ? - Non !

    Alors, inutile d’interroger vos fichiers,
    Inutile de feuilleter vos dictionnaires,
    Mon seul diplôme, C’est mon casier judiciaire,
    Aussi vierge que les pages de vos manuels d’histoire,

    Il vous suffit de donner la parole à vos non dits,
    Il vous suffit de lire le silence de vos constitutions,
    Pour me reconnaître,
    Moi, le vieil indien qui refuse de marcher en file indienne.


     © Saïd Bailal

  • Entre orient et occident

    Lorsque j'étais enfant, il m'arrivait certains soirs de ne pas entendre le marchand de sable passer. J'allais alors me plaindre à ma mère. Elle me conseillait d'écouter mes os ("shess iyekhssen nek" en rifain, un dialecte berbère marocain).

    "Ecouter ses os" signifiait pour ma mère entamer un voyage à l'intérieur de soi. Faire le bilan de sa journée. Si on n'a rien fait qui puisse déranger notre conscience, le sommeil finit par nous gagner. Sinon il fallait changer de comportement le lendemain, pour retrouver le sommeil et la paix de l'âme.

    Pauvre enfant que j'étais, soumis très tôt aux affres de sa mauvaise conscience et condamné à être le comptable de ses propres erreurs.


     

    Arrivé en France, j'ai appris qu'il suffisait de "compter les moutons" !
    Point de poésie. Le sommeil et la paix de l'âme sont une affaire de calcul algébrique.
    Pauvres moutons ! non seulement ils nous servent à assouvir nos appétits carnivores, mais aussi à s'acheter une bonne conscience.


     

    "Ecouter ses os" ou "compter les moutons" : deux visions philosophiques du monde.
    Au lieu de choisir entre les deux, j'ai appris à compter mes os tout en écoutant le bêlement des moutons me caressant avec leurs douce laine.

    C'est ainsi que les os et les moutons m'ont aidé à inventer une nouvelle géographie ou l'Orient et l'Occident se profilent main dans la main sous le même horizon.

    © Saïd Bailal

  • Paradoxes

    Un Narcisse qui boude son reflet , mais qui s'observe avec passion.

     

    L'air de nulle part, d'inappartenance foncière, de prédestination à l'exil.

     

    Une identité fluide de ceux qui passent en coup de vent.

     

    Avoir le souci d'être soi-même sans jamais négliger d'être un autre.

     

    Etre animé par la tentation de l'absolu et par le sentiment persistant de la vacuité.

     

    Désirer s'enrichir pour avoir le droit de mieux se ruiner.

     

    Abuser de l'existence sans en être rassasié.