Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Bernard Noël à propos d'incursions

medium_bernardnoel.2.gif

ci-dessous une prise de position du poète Français Bernard Noël. Il n'a pas pu la publier dans les journaux Français.

INCURSIONS OU IRRUPTION : LE GENOCIDE AU MOYEN-ORIENT SE POURSUIT

 

Le mot « incursion » sert à désigner, dans les derniers bulletins d’information de France-Culture, les opérations militaires israéliennes au Liban. Ce mot saisit parce qu’il est original par rapport au vocabulaire des autres chaînes. D’après Littré, « l’incursion est une course ; par conséquent celui qui la fait passe seulement sur le terrain qu’il ravage ». Bien que vieille d’un siècle et demi, cette définition décrit assez bien l’action d’Israël, sauf que la « course » viole cette fois l’espace aérien et que le « ravage » tombe ainsi principalement du ciel.

 

Littré renvoie au mot latin « incursio » qu’il traduit par « invasion ». La consultation du Gaffiot donne « choc , attaque » pour « incursio », puis « se jeter sur » pour « incursito » et « fondre sur, attaquer » pour « incurso ». Il ne faut pas, dit le Dictionnaire analogique, confondre « incursion » , qui est le fait de pénétrer momentanément dans un domaine qui n’est pas le sien, avec « irruption », qui consiste à pénétrer de vive force et à s’installer...

 

L’aviation est l’instrument parfait de « l’incursion » puisqu’elle « se jette sur » son objectif et retourne aussitôt vers sa base. Les chars, les commandos, l’infanterie, par contre, sont obligés de faire « irruption » même si, officiellement, leur commandement n’a pas l’intention de s’installer. L’armée israélienne, dénommée Tsahal, combine de toute évidence depuis un demi-siècle « incursion » et « irruption » pour le plus grand dommage de ses voisins.

 

L’histoire de cette période prouve en effet que l’existence et le comportement de Tsahal font de l’incursion et de l’irruption une méthode d’intimidation brutale dont l’exercice est sans cesse nourri d’actions violentes. Cela va du « bouclage » toujours arbitraire à la confiscation des terres, de la destruction des oliveraies et des maisons à l’assassinat ciblé, du bombardement des infrastructures civiles au bombardement des civils, de l’enlèvement et de la séquestration des responsables politiques à l’emprisonnement et à la torture de quiconque a l’infortune d’être au mauvais endroit au mauvais moment. Tout cela au nom d’un droit à l’autodéfense et à la sécurité dont le résultat est de créer une insécurité générale, non seulement autour d’Israël mais dans tout le Moyen Orient.

 

Devant tant de violences, dont le seul succès est d’en appeler et d’en rappeler d’autres aux références totalitaires fâcheuses, il semble que le simple bon sens aurait dû conduire à demander à la paix ce que ne peut obtenir la guerre. Mais non, l’Etat d’Israël s’obstine à entretenir l’oppression, la peur, la menace quand il ne passe pas à des actes qui visent à terroriser l’ennemi qu’en réalité ils fabri-quent. Pourtant, ces jours-ci, les actes en question atteignent un degré où l’injustifiable le dispute à la sauvagerie. Une sauvagerie masquée par la technologie guerrière qui métamorphose les tueries en une affaire inhumaine que les communiqués qualifient de « dégâts collatéraux ».

 

L’humanité a sans doute besoin du contact, de la vision directe ou du face à face pour que le tueur ait conscience du droit de mort dont il dispose. On peut croire que tel n’est pas le cas de l’artilleur ou de l’aviateur qui tirent sur un « objectif », mais comment accorder cette circonstance atténuante aux généraux, ministres et chef de gouvernement dont le moins qu’on puisse attendre d’eux est qu’ils sachent ce qu’ils font ? Quand on compare l’importance des « dégâts » et la justification qu’en donnent les responsables israéliens, on se demande ce qui l’emporte chez eux du mensonge ou du racisme dans leur empressement à pousser au crime.

 

Bien sûr, une bonne partie de leur arrogance dans le déni des faits tient à l’aide constante et à la conduite exemplaire de leur soutien américain, qui a si brillamment réussi la démocratisation de l’Irak et de l’Afghanistan. Les crimes de guerre, la torture des prisonniers, les massacres changent de nature dès lors qu’on les qualifie de lutte contre le terrorisme : ils tirent même de cette qualité une sanctification. Et puis, de toute évidence, les victimes de cette lutte n’ont pas droit à ce statut : il suffit de vous étiqueter « terroriste » pour que vous cessiez d’être un humain.

 

Depuis des années, et les témoignages abondent à ce propos, on assiste en Israël à un entraînement au mépris. Au mépris du Palestinien, jour après jour humilié aux check-points, privé de travail, privé d’eau, d’électricité, de nourriture, malmené pour un oui pour un non, emprisonné sans jugement... Encore n’est-ce là que les formes les plus douces d’une oppression qui n’hésite pas à recourir aux obus, aux bombes, aux fusillades à Gaza ou au fameux « Mur » qui est en train de transformer la Cisjordanie en camp de concentration.

 

La gravité de la situation ainsi créée s’accompagne de dizaines de morts avec un fort pourcentage de femmes et d’enfants. Tout cela a été dénoncé en vain par des articles, des documentaires, des livres, mais rien ne dénonce la dégradation morale qu’entraîne chez les Israéliens l’exercice régulier de l’oppression. Si l’artilleur et l’aviateur ne voient peut-être pas ce qu’ils font, l’oppresseur le voit fort bien quand il laisse des malheureux attendre des heures durant un passage, quand il enfonce les portes, casse les meubles, quand il écrase une maison avec son tank ou son bulldozer, quand il tire sur des enfants. Pour supporter ce face à face, il faut avoir pratiqué longuement le mépris et même en avoir fait sa culture. On sait à quel point il faut déshumaniser l’Autre pour le traiter comme un être inférieur.

 

Le gouvernement israélien organise cette déshumanisation et le mépris raciste qui en découle. Il s’étonne de la résistance qu’il rencontre dans le temps même où il s’efforce d’en finir avec elle. D’où ce redoublement de violence, qui prouve un désir de génocide latent, et la rage de ne pas oser l’accomplir. Cette rage aveugle monsieur Olmert et sa clique puisqu’elle les fait agir à l’inverse de l’intérêt de leur peuple également aveuglé par leur propagande. Ainsi au quinzième jour de la destruction du Liban avec des bombes américaines dans le but de provoquer le rejet du Hezbollah cause, soit disant, de tout ce malheur, un sondage révèle aujourd’hui que 87% des Libanais voient dans le Hezbollah un mouvement de résistance qui les honore.

 

La bêtise politique est criminelle : on le voyait en Irak, en Afghanistan, on le voit hélas en Palestine et au Liban. Le plus accablant est que cette bêtise ne rencontre aucune opposition dans un Occident qui se déshonore en lui trouvant des motifs respectables. Les pays arabes ne font pas mieux mais ils ont l’excuse, grâce encore à l’Amérique, d’avoir des gouvernements qui sont étrangers aux aspirations de leurs peuples. Il n’est pas nouveau de traiter de terroristes des mouvements de résistance, mais les utilisateurs de cette rhétorique apparemment inusable devraient savoir qu’il est dangereux de précipiter la résistance dans le désespoir.

 

L’honneur n’a jamais été le fort des diplomates et des commerçants, mais il fut longtemps la règle du jeu des militaires. Quel honneur pourrait-il y avoir à bombarder une usine de lait, les pistes d’un aéroport civil ou les immeubles de l’autorité palestinienne ? Il est dommage que Tsahal et ses généraux n’aient jamais eu à méditer ce vers classique devenu proverbial : « A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ». L’honneur d’Israël ne tient plus qu’aux quelques « refuzniks » qui refusent de massacrer des innocents, mais pour Tsahal, il est trop tard, cette armée d’élite n’est entraînée qu’à écraser plus faible qu’elle aussi doit-on la considérer désormais comme la plus lâche du monde.

Bernard Noël.

 

 

Commentaires

  • ça ne m'étonne pas qu'il n'a pas été publié, les complices et les lâches se tiennent les coudes et surtout la vérité fait trop mal... il risque d'y avoir un sursaut de conscience.

  • Ce n'est pas étonnant qu'il n'ait été publié :)
    J'aime bien sa conclusion concernant l'honneur militaire.

  • Bernard Noel a une araignée dans le plafond mais ce n'est pas nouveau.

  • Phineus >

    "J'aime les fines toiles
    Si joliment tissées
    Gravitant les cerveaux
    Que les peuples détruisent"
    Délie

    En l'occurence les peuples indifférents ...

  • Merci pour ton rectificatif Reda mais moi je préfère "mettre MON étonnement" en exergue même si c'est bourré de fautes ! :)

  • delie >

    c'est un grand poète mais quand il fait chorus avec les fous de Dieu il n'est plus que délirant

  • Il n'est pas question de fous de dieu mais de crimes contre l'humanité, de résistance des uns et de jemenfoutisme des autres... à moi que les fous tout court soit du coté d'Israël alors là, je comprends mieux.

  • Nous sommes des barbares...

  • l'avis "pertinent" des spectateurs assis sur les gradins de l'arène des gladiateurs est-il représentatif de quoi que ce soit?

    des paroles vaines qui ne changeront rien, du concentré d'opinions stériles....combien iront mettre leurs actes en conformité avec leurs paroles? aucun....ils causent en attendant le passage de la vendeuse de raffraîchissements, d'eskimos et de chouchous. et dans leurs discours concernant des sujets qui ne les concernent pas se reflètent leurs états intérieurs.....où est l'amour dans cela? où est le bien être? où est la paix?

  • De passage après une longue période d'errance. a+ Lpv

  • “Journal de guerre”, par Etienne, un enseignant franco-libanais habitant Baalbek, site maintenu au jour le jour malgré les bombardements et autres problèmes subséquents d'électricité...
    http://guerreliban2006.blogspot.com/

    Encouragez-le avant que son immeuble ne soit rasé...

  • salamo alykom

    iwa hena m3a lobnan
    tous avec le liban
    we support lebanonn

    tous libanais tous le coeur et la rose entre les mains.

    bye et bon blog

  • Un juste !

  • Le problème principal du Liban comme du monde en générale, Arabe ou non, se trouve peut être dans l'acceptation de ses dirigeants mis en place par les multinationales, dans leur seul et unique intérêt, au dépend de celui des peuples et de leur environnement.
    Se foutant des problèmes de ces derniers, osant même s'auto-réconforter de ne pas avoir été choisi à leur place pour se faire laminer, oubliant que le tour de chacun viendra tant qu'aucun ne sera capable d'acte réelles de solidarité au lieu de dénonciation stériles.

    Le jour où ce monde, sera foutue de prendre son destin en main pour installer un gouvernement à l'écoute de son peuple, et capable de se sentir solidaire de ses frères, il sera alors probable que les usurpateurs d'Israël, comme des USA ou des autres tyrannies, cesseront d'agir avec le même mépris pour leurs cousins et voisins comme s'ils représentaient une gêne à effacer sans aucun scrupules, d'un simple revers de la main.

  • Si l'ami GMC pense qu'il y en a qui restent confortablement installés sur les gradins pour commenter le spectacle, il peut tjrs actionner le siège éjectable de son engin de guerre pour

    - une action directe sur le terrain

    - nous "lâcher" un peu...

  • Foncez la baillonette au fusil sans assez de comprendre quel sont les causes et les enjeux d'un conflit est la chose la plus stupide que je connaisse.
    Heureusement que certaines se posent quand même la question de savoir quelles sont ces derniers tandis que d'autres, tels des boeufs enragés, soutiennent illico les pires causes qui soient pourvue que le nombre soit avec eux.

  • Je n'ai rien à redire au texte de Bernard Noël, si ce n'est la mention d'un génocide latent. J'estime que c'est une connerie, pour tous les partisans de la cause palestinienne et arabe, que de vouloir systématiquement faire des parallèles foireux avec le génocide nazi. Les crimes d'Israël se suffisent à eux-même sans que nous ayions besoins de tendre aux sionistes le prétexte - béni par eux - d'une chasse aux sorcières révisionnistes et antisémites.

  • délie,

    gmc ne pense pas, il constate, nuance appréciable.

  • Pourquoi croit-on toujours à la paix au Proche orient?

  • Malheur est de constater que "la Paix" au proche-orient ne se fera sûrement pas avant que le Maroc ais fait marcher une femme sur la lune, que les USA devienne une Démocratie à l'Athénienne et non à la Lacédémonienne, que G.W.Bush remporte le prix Nobel de littérature ou Hitler celui que de la Paix, même à titre posthume :-)

    Non sans blague, où est-il écrit dans l'ancien testament que la terre promise était celle d'Israël?
    Pourquoi punir les Palestiniens des crimes commis par les Allemands?
    Auraient-ils commis eux aussi un Génocide pire que celui des Teutons et de leurs alliés Turcs?

  • Il n'y a rien de pire qu'un esclave affranchi : il devient le pire des tyrans.
    Israël a subi. Maintenant il fait subir.
    C'est ds l'ordre des choses, c'est ds l'ordre de ce monde...

  • Merci Kalima pour ta gentille visite.
    Absolument délie !
    Mais maintenant il en sort amoindri avec les Usa face à l'Europe qui aura beaucoup moins de complexes par rapport au nazisme et surtout face au Hamas, démocratiquement élu, qui vient de constater qu'Israel est loin d'être invincible.

  • C'est une fois de plus la guerre des mafias, à la différence que cette fois ci les mafia diamentaires perde du terrains faces aux mafias pétroliére à cause de l'inflation de l'or noire.

Les commentaires sont fermés.